LA CONVENTION MÉDICRIME
La Convention Médicrime : le 1er instrument juridique criminalisant la fabrication et la distribution de faux produits médicaux.
Fin 2010, le Comité des Ministres des 47 états du Conseil de l’Europe a adopté un projet de Convention ouverte : La « Convention du Conseil de l’Europe sur la contrefaçon des produits médicaux et les infractions similaires menaçant la santé publique » autrement appelée Convention Médicrime, l’unique outil international qui criminalise la contrefaçon mais aussi la fabrication et la distribution de produits médicaux mis sur le marché sans autorisation ou en violation des normes de sécurité. Ouverte à signature le 28 octobre 2011, la Convention Médicrime compte aujourd’hui 26 Etats signataires.
1. Le contexte
La contrefaçon de produits médicaux et la criminalité associée menacent la santé publique. Depuis quelques années, le phénomène est en constante augmentation et atteint des proportions inquiétantes : il est très difficile d’avoir une vision complètement objective des choses mais on s’accorde à considérer qu’elle représente aujourd’hui près de 10 % du commerce mondial des médicaments. En cause notamment, une distribution de masse facilitée par Internet, une industrie très lucrative et peu risquée.
Jusqu’à maintenant, il n’existait pas de législation harmonisée au niveau international qui aurait permis une criminalisation de ces pratiques et l’application de sanctions dissuasives. Le Conseil de l’Europe a alors considéré comme une responsabilité commune pour la communauté internationale de vaincre ce fléau.
Dans ce contexte, et depuis 2004, le Conseil de l’Europe a travaillé sur l’élaboration d’un traité de droit pénal international : la Convention Médicrime. Ouverte à signature et ratification depuis octobre 2011 aux pays du monde entier et pas seulement aux 47 états du Conseil de l’Europe, la Convention offre un puissant instrument juridique international criminalisant la contrefaçon.
2. La Convention Médicrime
Destinée à protéger la santé publique du fléau de la contrefaçon de produits médicaux, la Convention Médicrime introduit des sanctions pénales en érigeant en infraction certains actes, y compris la complicité et la tentative de commission d’une contrefaçon, mais également en mettant en place des mesures de prévention et de protection des victimes. Elle offre également un cadre de coopération internationale et des mesures destinées à améliorer la coordination des actions au niveau national.
Ainsi, la Convention Médicrime permettra de renforcer la lutte contre un trafic lucratif en imposant des mesures de répression plus strictes au niveau national.
La Convention Médicrime s’applique à tous les produits médicaux.
Le terme produits médicaux désigne :
- les médicaments à usage humain et vétérinaires ;
- les dispositifs médicaux (destinés à des fins diagnostiques et thérapeutiques) ;
- les diverses substances actives, excipients, éléments ou matériaux qui les composent ; que ces produits médicaux soient ou non protégés par des droits de propriété intellectuelle ou qu’ils soient ou non des produits génériques.
La Convention s’applique également pour les infractions similaires qui recouvrent la fabrication, le stockage, le trafic et l’offre de vente de produits médicaux passant délibérément outre le contrôle des autorités médicales.
2.2 Vers une criminalisation de la contrefaçon des produits médicaux et des infractions similaires
La Convention Médicrime, premier instrument international dans le domaine du droit pénal fait obligation aux états adhérents d’ériger en infraction pénale toute une série de délits du fait du danger qu’ils représentent pour la santé publique :
- la fabrication intentionnelle de produits médicaux contrefaits, de leurs substances actives, excipients, éléments, matériaux et accessoires contrefaits et de leur adultération (ajout ou substitution préjudiciable non déclarée réduisant la qualité du produit) ;
- la fourniture intentionnelle, l’offre de fourniture, le trafic, y compris le stockage, l’importation et l’exportation de produits médicaux contrefaits. La fourniture désigne les actes qui consistent à procurer, vendre, donner, proposer gratuitement les contrefaçons ou encore d’assurer la promotion de ces produits ;
- la fabrication et la falsification intentionnelle de documents, notamment les emballages, étiquetages et contenus Internet accompagnant le produit ;
- la fabrication ou la fourniture non autorisée de produits médicaux et la mise sur le marché de dispositifs médicaux ne remplissant pas les exigences de conformité ;
- la complicité et la tentative de perpétration de contrefaçon.
2.3 Pour des sanctions efficaces, proportionnées et dissuasives
Les infractions établies pour des personnes physiques, conformément à la Convention Médicrime, sont passibles de sanctions effectives, proportionnées et dissuasives, celles-ci incluant la réclusion criminelle et l’emprisonnement pouvant donner lieu à l’extradition.
Les personnes morales déclarées responsables peuvent éventuellement être passibles d’autres mesures telles que des interdictions temporaires ou définitives d’exercer une activité commerciale, un placement sous surveillance judiciaire voire même une dissolution judiciaire.
La Convention Médicrime prévoit également la saisie et la confiscation des produits, composants, matériels et accessoires relatifs aux actes liés à la contrefaçon de produits médicaux et aux infractions similaires. La confiscation des revenus générés par ces activités criminelles – blanchiment d’argent- et la destruction des saisies sont également prévues.
Médicrime retient comme circonstances aggravantes de nombreux faits, dont le décès ou l’atteinte à la santé physique ou mentale de la victime, les abus de confiance, le recours à une diffusion massive (dont Internet), un lien avec une organisation criminelle et la récidive.
2.4 Des solutions face à ce fléau d’ampleur internationale
La Convention Médicrime prévoit une amélioration de la coopération au niveau national à travers les différents secteurs administratif, industriel et commercial. Elle prévoit également une coopération et un principe d’échange d’informations entre les différents représentants des autorités sanitaires, des douanes et des forces de l’ordre.
La Convention prévoit également une coopération internationale entre les différents états signataires, tant d’un point de vue pénal qu’administratif.
L’effort de coopération en matière pénale s’appliquera aux enquêtes, procédures, exécutions des saisies/confiscations mais aussi aux extraditions et à l’entraide judiciaire ; en matière administrative, un centre référent par état signataire pourra assurer la récolte des demandes d’information et/ou de coopération. De plus, des programmes d’assistance au développement pourront être conduits au profit d’états tiers.
A destination des secteurs publics et privés, la Convention Médicrime propose des mesures de prévention : des campagnes de sensibilisation sur les moyens d’éviter les produits médicaux dangereux, un système d’alerte, des programmes de formation à destination des agents de la fonction publique et des professionnels de santé et des outils d’identification et de suivi des dommages sanitaires. La sensibilisation ou la conclusion d’accords avec les fournisseurs d’accès Internet est également prévue dans ces mesures préventives.
La Convention Médicrime place parmi ses priorités des mesures de protection des victimes avec un droit au dédommagement et une assistance dans le rétablissement physique, psychologique et social. Des mesures de protection des droits et intérêts des victimes dans les enquêtes et procédures pénales ont également été prévues par la Convention.
Enfin, la Convention Médicrime prévoit la création d’un organe de suivi chargé de superviser la mise en œuvre de la Convention par les états partis.
2.5 Les 27 états signataires à ce jour
Depuis l’ouverture à la signature de la Convention à Moscou le 28 octobre 2011, 27 états se sont portés signataires :
- l’Autriche, Chypre, la Finlande, la France, l’Allemagne, l’Islande, l’Italie, le Portugal, la Russie, la Suisse, l’Ukraine et Israël (état non membre du Conseil de l’Europe) dès l’ouverture à signature de la Convention le 28 octobre 2011 ;
- le Liechtenstein le 4 novembre 2011,
- le Luxembourg le 22 décembre 2011,
- le Danemark le 12 janvier 2012,
- la Turquie le 29 juin 2012,
- la Belgique le 24 juillet 2012,
- l’Arménie et la Moldavie le 20 septembre 2012,
- l’Espagne le 8 octobre 2012,
- la Guinée le 10 octobre 2012,
- le Maroc le 13 décembre 2012,
- la Hongrie le 26 septembre 2013,
- la Croatie le 3 septembre 2015,
- la Bosnie-Herzégovine le 4 décembre 2015,
- l’Albanie le 17 décembre 2015.
- et le Burkina Faso le 16 février 2017
9 pays ont ratifié la convention :
- l’Ukraine le 20 août 2012,
- l’Espagne le 5 août 2013,
- la Hongrie le 9 janvier 2014,
- la Moldavie le 14 août 2014,
- la Guinée le 24 septembre 2015,
- l’Arménie le 5 février 2016;
- l’Albanie le 6 juin 2016;
- la Belgique le 1er août 2016;
- et la France le 21 septembre 2016
L’entrée en vigueur de la convention Médicrime est active sous la condition de 5 ratifications incluant au moins 3 états membres du Conseil de l’Europe. Depuis la ratification de la Guinée, le 24 septembre 2015, la convention est entrée en vigueur le 1er janvier 2016.
2.6 L’élaboration de la Convention Médicrime en 7 dates clés
En 2004, l’ancien Groupe ad hoc du Conseil de l’Europe qui travaille sur la contrefaçon des médicaments réalise la première étude systématique relative à la législation, aux structures administratives et aux procédures applicables en matière de contrefaçon des médicaments.
En 2005, ce Groupe ad hoc appelle à élaborer un plan d’actions global comportant des activités juridiques concrètes à mener en coopération avec d’autres organisations internationales concernées et ce, afin de lutter efficacement contre la criminalité dans le domaine pharmaceutique.
Les 23 et 24 octobre 2006, la conférence internationale « L’Europe contre les médicaments de contrefaçon » a été organisée à Moscou par la Fédération de Russie, sous l’égide de la présidence du Comité des Ministres, avec le soutien de l’ancien Groupe ad hoc et de la Direction Européenne de la Qualité du Médicament et Soins de Santé (DEQM). Cette conférence a appelé l’ensemble des acteurs publics et privés concernés par la sécurité pharmaceutique à prendre leurs responsabilités en matière de protection de la santé publique contre la criminalité pharmaceutique, en élaborant une Convention visant à combattre cette forme de criminalité et en créant l’environnement politique propre à assurer sa mise en œuvre. L’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe a soutenu ces activités par le biais de ses recommandations.
De 2007 à 2009, des travaux d’élaboration du texte de la Convention Médicrime sont réalisés sous l’égide du Comité des Ministres du Conseil de l’Europe et grâce à une coopération intersecrétariats entre la Direction Générale des Droits de l’Homme et des Affaires Juridiques (DG-HL) et la Direction Générale de la Cohésion Sociale, par l’intermédiaire de sa DEQM.
Les 15 et 16 avril 2010, la Convention Médicrime est finalisée et présentée lors d’une conférence internationale du Conseil de l’Europe tenue à Bâle en Suisse destinée à préparer sa mise en œuvre pratique.
Le 8 décembre 2010, la Convention Médicrime est adoptée par le Comité des Ministres à Strasbourg, au siège du Conseil de l’Europe.
Le 28 octobre 2011, la Convention Médicrime est ouverte à la signature et soumise à ratification, acceptation ou approbation à Moscou lors d’une conférence internationale organisée conjointement par les autorités compétentes de la Fédération de Russie, la DG-HL et la DEQM de la Direction Générale de la Cohésion Sociale. Douze états membres du Conseil de l’Europe se portent signataires dont la France.
Les 21 et 22 novembre 2013 s’est tenue, à Madrid (Espagne), la Conférence Régionale intitulée « De la signature à la ratification et la mise en œuvre de la Convention du Conseil de l’Europe sur la contrefaçon des produits médicaux et les infractions similaires menaçant la santé publique (Convention Médicrime) ». Des représentants d’Andorre, Belgique, France, Allemagne, République de Guinée, Irlande, Italie, Luxembourg, Monaco, Maroc, Portugal, Espagne, Suisse et Royaume Uni ont participé à cette réunion.
Les objectifs de la conférence sont les suivants :
- encourager les Etats membres à signer et ratifier la Convention ;
- sensibiliser les membres du parlement, la police, les ONG, les médias et autres professionnels qui travaillent dans le domaine ;
- discuter les avantages et les défis de la ratification de la Convention ;
- échanger les expériences et les connaissances en la matière et promouvoir les contacts professionnels.
Le 1er janvier 2016, la Convention Médicrime entre en vigueur dans les 7 Etats l’ayant ratifiée (6 pays européens et un pays tiers) : l’Ukraine, l’Espagne, La Hongrie, la Moldavie, l’Arménie, la Guinée et l’Albanie. L’entrée en vigueur de la convention Médicrime est active sous la condition de 5 ratifications incluant au moins 3 Etats membres du Conseil de l’Europe.
Aujourd’hui, 26 Etats sont signataires de la Convention Médicrime (au 1er janvier 2016).
Pour aller plus loin :
– Convention du Conseil de l’Europe sur la contrefaçon des produits médicaux et les infractions similaires menaçant la santé publique. Octobre 2011.
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– Conseil de l’Europe. Contrefaçon de produits médicaux Médicrime (Site officiel).
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– Rapport explicatif de la Convention du Conseil de l’Europe sur la contrefaçon des produits médicaux et les infractions similaires menaçant la santé publique. Octobre 2011.
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– Fiche d’information sur la Convention Médicrime. Octobre 2011.
Information disponible à l’adresse suivante : cliquez ici
– Conseil de l’Europe. La Convention Médicrime. Combattre la contrefaçon des produits médicaux et les infractions similaires. Direction européenne de la qualité du médicament et soins de santé (DEQM) et Conseil de l’Europe. Octobre 2011.
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– Direction Européenne de la Qualité du Médicament et soins de santé (DEQM) (Site Internet).
Information disponible à l’adresse suivante : cliquez ici
– Etats signataires de la Convention Médicrime.
Information disponible à l’adresse suivante : cliquez ici
– Conférence Régionale « De la signature à la ratification et la mise en œuvre de la Convention du Conseil de l’Europe sur la contrefaçon des produits médicaux et les infractions similaires menaçant la santé publique ».
Madrid (Espagne), 21-22 novembre 2013
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– Liste des déclarations formulées au titre du traité n° 211. Convention du Conseil de l’Europe sur la contrefaçon des produits médicaux et les infractions similaires menaçant la santé publique. Situation au 25/9/2015.
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