• Enjeu prioritaire : la santé
a. Pays en développement : un état d’urgence sanitaire
Le trafic de faux médicaments s’attaque en priorité aux populations des pays émergents.
Systèmes de santé et de protection juridique défaillants, inefficience des organismes de contrôle, pénurie de médicaments, pauvreté et manque d’informations des patients, corruption parfois. Toutes ces causes contribuent à fragiliser les moins développés des pays d’Afrique, d’Asie ou d’Amérique du Sud. Ceux-ci comptent donc au nombre des pays les plus exposés aux risques sanitaires.
Les médicaments « vitaux », cibles de prédilection des trafiquants
Le marché des contrefaçons des produits de santé dans les pays émergents touche en priorité les types de médicaments destinés à traiter des affections potentiellement mortelles (paludisme, sida, tuberculose…) et s’étend aux antibiotiques, analgésiques, antiparasitaires, et produits sanguins.
Cette particularité fait donc peser, contrairement aux pays développés, une menace supplémentaire sur les habitants des pays émergents. Dupés par des faux médicaments inefficaces, chacun pense se soigner contre une maladie grave alors qu’il n’en est rien. Ainsi, l’absence de principe actif dans la plupart des produits contrefaits ou les impuretés qu’ils contiennent induisent un risque réel d’échec thérapeutique ou d’accident collatéral grave.
A grande échelle, la prolifération des faux médicaments au sein des pays émergents sape les fondements des systèmes de santé en contribuant à les discréditer aux yeux des populations.
Le trafic de faux médicaments freine ainsi le développement des pays qui en ont le plus besoin.
b. Pays développés : Une progression alarmante
Longtemps protégé contre le trafic de faux médicaments, le marché des produits de santé dans les pays occidentaux est aujourd’hui exposé à la menace de la falsification.
En 2006, l’OMS estimait que les médicaments contrefaits représentaient 1% du marché des produits de santé dans les pays développés et le premier décès officiellement attribué à l’ingestion d’un médicament falsifié a été enregistré en 2007.
• USA
Très exposés, les Etats-Unis pâtissent de la très grande différence de prix existant entre leurs médicaments et ceux des pays frontaliers. Par ailleurs, les trafiquants exploitent les failles d’un système qui souffre de grandes disparités en termes de couverture sociale et de revenus (LEEM, guide à l’usage des pharmaciens ; page 4).
Par ailleurs, les carences en matière de couverture sociale et de remboursement des soins incitent les américains des classes populaires à prendre le risque d’acheter des médicaments contrefaits, mais moins chers. Des achats « à risques » facilités par le vecteur internet.
Le phénomène devient ainsi un sujet de préoccupation de premier plan pour les autorités américaines.
- En 5 ans, la contrefaçon de médicaments a presque été multipliée par 10 (LEEM).
- L’agence de santé américaine, la Food and Drug Administration (FDA), a ouvert, en 2008, 58 enquêtes touchant à la contrefaçon de médicaments (contre seulement 6 en 2000).
• Europe
En Europe, la lutte contre le trafic de médicaments repose surtout sur les systèmes nationaux qui sécurisent la distribution et la commercialisation des médicaments. La situation est donc très variable d’un pays à l’autre.
La Grande-Bretagne par exemple compte parmi les pays européens les plus touchés par la contrefaçon de médicaments tandis que la France semble relativement épargnée.
Les pays européens qui bénéficient d’un système de remboursement des frais de santé efficace et de circuits de distribution très réglementés, organisés et encadrés par des agences de santé sont moins exposés que les autres.
Pourtant, même dans les pays les mieux protégés comme la France, les importations parallèles (autorisées par la Communauté européenne pour les répartiteurs et les grossistes), la libre circulation des médicaments et les possibilités d’achat sur internet contribuent à fragiliser le système et exposent les marchés nationaux à des risques croissants d’entrées de faux médicaments.
En Europe, la Grande-Bretagne, les Pays-Bas et, de façon plus encadrée, l’Allemagne sont les seuls pays à avoir autorisé la vente réglementée de médicaments sur internet.
En Europe, comme ailleurs, la quantité de médicaments contrefaits est en augmentation importante.
Nombre de médicaments contrefaisants interceptés par les douanes européennes (Commission européenne) :
- 3 200 492 en 2010,
- 7 423 824 en 2009,
- 8 891 056 en 2008,
- 4 081 056 en 2007,
- 2 711 410 en 2006,
- 560 598 en 2005.
Notamment :

Comme aux Etats-Unis et contrairement aux pays en développement, le marché de la contrefaçon de médicaments touche essentiellement aux produits à forte valeur ajoutée, médicaments dits « de société » et les produits plus réglementés (psychotropes, stéroïdes anabolisants, etc.).
Et au delà de la santé…
Bien qu’indirect, un autre enjeu de la lutte contre le trafic de faux médicaments n’en est pas moins préoccupant. Une manne financière pour le crime organisé et les réseaux terroristes.
Très rentable au vu des faibles risques encourus par les trafiquants, le trafic de faux médicaments est devenu en quelques années la source la plus lucrative des activités du crime organisé. Il est ainsi en passe de supplanter le trafic de drogue en tête du palmarès des activités mafieuses (drogue, proxénétisme, vols, braquages, etc.).
Cet argent issu d’une économie souterraine frauduleuse irrigue ainsi l’ensemble des activités criminelles et terroristes, menaçant directement la sécurité des biens et des personnes partout dans le monde.
« La contrefaçon est une activité criminelle à part entière qui n’est pas en périphérie des autres activités criminelles mais au cœur de celles-ci. » Secrétaire général d’Interpol.
« La contrefaçon est un vecteur pour le crime organisé et ne peut, dans sa complexité et sa gravité, être comparée qu’au trafic de stupéfiants ou d’armes. »
Déclaration du conseil des Ministres de l’Union européenne (13 novembre 2003).